Par Moira Allen
dimanche 15 juillet 2007.
Traduction par Phylia
En tant qu’écrivain, vous voulez naturellement vous faire un nom. Mais qu’en est-il si ce nom n’est pas celui avec lequel vous êtes né ? Écrire sous un pseudonyme ou sous un "nom de plume" est une bonne et honorable tradition ; beaucoup des plus grands noms de la littérature ont été "inventés" et bien des auteurs des meilleures ventes d’aujourd’hui utilisent eux aussi des pseudonymes. Devriez-vous faire de même ?
La réponse dépendra de la raison pour laquelle vous souhaitez faire ainsi. Comme toutes les décisions en rapport avec l’écriture, il y a de bonnes et de mauvaises raisons pour utiliser un nom de plume. Commençons avec quelques mauvaises raisons :
1. "J’aimerais quelque chose de plus exotique." Cela implique souvent l’hypothèse selon laquelle les éditeurs (ou les lecteurs) sont plus "impressionnés" par un nom plus intéressant. Ce ne sera pas le cas. Laissez votre écriture les impressionner, et bientôt votre nom sera considéré comme "impressionnant" par lui-même.
2. "Je voudrais un nom qui reflète mon moi intérieur." Cela dépend de ce qu’est votre "moi intérieur". Si un nom comme "Merlin Firecat" ou "Lady Starshine" peut refléter quelque chose de profondément ancré en vous, il va probablement transmettre une impression d’amateurisme à un éditeur. Si vous voulez utiliser un pseudonyme, choisissez-le professionnel.
3. "Je ne veux pas que tout le monde sache que je suis l’auteur." La plupart des éditeurs ont peu de patience à l’égard des auteurs qui veulent "se cacher" derrière un faux nom. Si vous présentez une opinion controversée, vous devez être prêt à la défendre. Si vous craignez que certains ne respectent pas le genre dans lequel vous écrivez, gardez à l’esprit que c’est leur problème et non le vôtre. Et finalement, si vous avez honte de ce que vous écrivez, vous feriez probablement mieux de changer de sujet que de changer votre nom.
4. "Je ne veux pas que mes connaissances/amis/collègues de travail sachent que j’écris sur eux." Un pseudonyme ne vous protégera pas contre les répercussions légales liées au fait d’écrire sur d’autres personnes — par exemple des accusations de calomnie ou de diffamation. Plutôt que de déguiser votre identité, il pourrait être plus avisé de déguiser celle de vos sujets, ainsi personne ne pensera que vous écrivez à propos d’"eux" en premier lieu.
5. "Personne ne me respectera parce que ------ (remplissez le blanc)." L’époque où l’on écrivait sous un pseudonyme masculin uniquement parce que l’on était une femme est révolue depuis longtemps. Aujourd’hui, il est inutile de s’appeler "George Sand" quand "Aurore Dupin" ferait tout aussi bien l’affaire. Vous ne devriez pas non plus, en théorie, ressentir le besoin de cacher votre origine, votre ethnie ou votre culture derrière un pseudonyme. Toutefois, vous devriez probablement vous baser sur votre expérience pour prendre une décision à ce sujet.
Il y a aussi de nombreuses bonnes raisons d’utiliser un pseudonyme :
1. Votre écriture peut interférer avec d’autres aspects de votre carrière. Malheureusement, certaines professions ne s’harmonisent pas très bien avec la vie d’écrivain. Si vous êtes un professeur de littérature très respecté le jour et un écrivain de ce que vos collègues (et patrons) considèrent comme de la fiction "non littéraire" la nuit, vous avez là une bonne raison d’utiliser un pseudonyme. Certains écrivains trouvent qu’un nom de plume est un moyen excellent et nécessaire pour séparer leur carrière d’écrivain de leur travail.
2. Vous écrivez dans plus d’un genre ou domaine. Les écrivains qui ont tenté de "croiser les genres" ont souvent obtenu un résultat décevant. Les agents et les éditeurs peuvent aussi préférer qu’un auteur utilise des noms différents pour des genres différents ; Dean Koontz, par exemple, a utilisé plusieurs pseudonymes par le passé (mais ne fait plus ainsi). Plutôt que de dérouter vos lecteurs, il peut être préférable de développer différents lectorats pour chacun des genres dans lesquels vous écrivez.
3. Vous écrivez dans un genre qui a "des attentes" à propos de ses auteurs. À quand remonte la dernière fois que vous avez vu un roman d’amour par "Jacques Forgeron" ou un thriller endurci par "Felicité Valentin" ? Dans certains genres, les auteurs préfèrent souvent se conformer aux attentes du lecteur (ou les éditeurs exigent peut-être qu’ils fassent ainsi).
4. Vous avez des antécédents d’échec. Plus d’un auteur a subi une série de fiascos (ou même un roman qui a connu moins de succès que les autres) et va écrire des best-sellers sous un nom différent. S’il est probable que les éditeurs ou les agents associent votre nom à vos échecs précédents, il pourrait être avisé d’essayer un patronyme différent. Toutefois, n’essayez pas de rééditer ces "fiascos" après que votre nouveau nom ait connu le succès !
5. Vous avez le même nom qu’un auteur déjà existant. Si votre nom est Stephen King, Anne Rice, ou J. D. Salinger, votre éditeur peut exiger que vous "le changiez" pour éviter la confusion. Parfois vous pouvez vous en sortir avec une variation de votre nom — par exemple, en écrivant en tant que S. B. King ou A. Gloria Rice (en présumant que celui-ci soit votre second prénom).
6. Vous écrivez en collaboration. Souvent, des auteurs qui collaborent inventeront un pseudonyme pour donner l’impression qu’un livre a été écrit par un unique auteur. Par exemple, Robert Silverberg et Randall Garrett ont collaboré sous le nom de "Robert Randall."
7. Vous utilisez un "nom maison" de l’éditeur. Quelques pseudonymes — comme "V. C. Andrews" — appartiennent à l’éditeur. Dans ce cas, le pseudonyme est généralement une marque déposée. Les auteurs qui écrivent sous de tels noms travaillent généralement au forfait (c’est-à-dire qu’ils ne seront pas autorisés à revendiquer un tel travail sous leur propre nom avant un long moment).
8. Vous détestez votre nom. Dans certaines circonstances, avoir un nom "affreux" peut être une raison suffisante pour utiliser un pseudonyme. Par exemple, si votre nom est Lila Latrine ou Barnaby Backhouse, vous pourriez vouloir un nom de plume plus littéraire. Le même cas pourrait s’appliquer si votre nom est difficile à prononcer ou à orthographier (et donc difficile pour des lecteurs à se rappeler ou à commander à la librairie) ; par exemple, Dennis Max Cornelius Woodruffe-Peacock a raisonnablement choisi d’écrire en tant que "Max Peacock."
9. Vous écrivez pour des publications concurrentes. Après avoir lu cet article dans Inklings, Carolee Boyles indique qu’une autre bonne raison pour utiliser un pseudonyme est lorsque que l’on écrit pour des publications concurrentes dans un même domaine. "Je suis bien connue dans une très petite industrie, dans laquelle les magazines commerciaux sont très compétitifs. J’écris pour un magazine sous mon propre nom. Il y a environ un an, un autre m’a demandé d’écrire pour lui, mais parce que mon nom était sur le bandeau du premier magazine, j’ai dû refuser. Ils sont allés chez mon éditeur original et lui ont demandé si ce serait d’accord pour moi d’écrire pour eux sous un autre nom. Donc, je suis Carolee Boyles (moi-même) pour un magazine, Marjorie Sessions pour un autre et je suis sur le point de devenir Max MacKenzie pour un troisième. Les éditeurs savent tous ce que je fais, mais je ne mélange pas les sujets entre les magazines, et je garde les noms séparés. Tout fonctionne à l’avantage de chacun."
Souvent, écrire sous un pseudonyme est aussi facile que de mettre l’expression "écrit en tant que" sur votre manuscrit. Pour des articles, des histoires courtes et de la poésie, vous pouvez simplement mettre votre nom réel dans le coin supérieur gauche de votre manuscrit (ou sur la couverture) et inscrire votre pseudonyme sur une ligne au-dessous du titre. Cependant, pour vous assurer que votre éditeur publie le travail sous le nom "correct", vous pouvez rappeler à l’éditeur dans votre lettre d’accompagnement que vous "écrivez en tant que" votre pseudonyme.
Aux États-Unis, le Bureau des Droits d’auteur offre plusieurs façons d’enregistrer des travaux écrits sous pseudonyme. Le premier, et le plus sûr, est d’enregistrer votre nom légal sous "écrivant en tant que," suivi par votre pseudonyme (par exemple, "Marie Smith, écrivant en tant que Marianne Carmichael"). Vous devez aussi cocher "oui" à la question, "cet auteur a-t-il contribué à un travail sous pseudonyme ?" Si vous ne voulez pas révéler votre identité, vous pouvez aussi fournir seulement votre pseudonyme et l’identifier comme tel (par exemple, "Marianne Carmichael, pseudonyme") ou laisser blanc l’espace réservé à l’auteur. Vous pouvez aussi utiliser votre pseudonyme à la ligne "prétendant aux droits d’auteur", bien que le Bureau des Droits d’auteur avertisse que l’utilisation d’un nom factice pourrait ici provoquer des problèmes légaux quant à la propriété du droit d’auteur et suggère que vous consultiez un avocat d’abord.
Malheureusement, il n’est plus aussi simple de garder secret votre nom réel aux yeux de vos éditeurs. Dans le passé, on pouvait souvent utiliser un pseudonyme pour toute la correspondance éditoriale et prendre simplement une disposition avec sa banque pour avoir des chèques déposés sous son pseudonyme. Maintenant, les éditeurs sont obligés d’informer l’IRS [1] (via le Formulaire 1099) des paiements faits aux auteurs, ce qui signifie qu’ils doivent avoir votre numéro de Sécurité sociale et votre nom réel. Cependant, si vous utilisez un agent, vous pouvez traiter de tels paiements par son intermédiaire sans révéler votre identité aux éditeurs.
La dernière chose à garder à l’esprit quand on utilise un pseudonyme est qu’il ne vous protégera d’aucun procès qui pourrait résulter de vos écrits. Un pseudonyme n’a aucune existence comme entité "légale" ; peu importe quel nom vous mettez sur votre travail, la responsabilité de ce travail repose toujours sur vous.
Moira Allen, éditrice de Writing-World.com, a publié plus de 350 articles et chroniques, ainsi que sept livres, y compris How to Write for Magazines, Starting Your Career as a Freelance Writer, The Writer’s Guide to Queries, Pitches and Proposals, et Writing.com : Creative Internet Strategies to Advance Your Writing Career (tous en anglais). Elle collabore en tant qu’éditrice pour le magazine The Writer et a écrit pour le Writer’s Digest, Byline, et diverses autres publications sur le thème de l’écriture. En plus de Writing-World.com, Elle héberge le site de voyage TimeTravel-Britain.com, The Pet Loss Support Page, et le site de photographie AllenImages.net. Elle peut être contactée via sa page de contact (messages en anglais).
Cet article a d’abord été publié en anglais sur Writing-World.com - http://www.writing-world.com/.
[1] Équivalent américain du FISC.