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Milieux fléchissants

Par Vicki Hinze

vendredi 15 août 2008.

Traduction par Freyja


Qu’entend-on précisément par milieu fléchissant ?

Lorsque vous commencez à écrire une histoire, vous débutez comme un bolide débordant d’enthousiasme. Vous connaissez souvent le début et la fin. C’est la manière d’aller de l’un à l’autre qui vous gêne — en fait, ce qui se passe vraiment. Le milieu. Et si vous ne faites pas attention, il fléchira sous le poids de l’histoire.

Fléchir ?

Vers la fin du Chapitre Trois, ce bolide se mue en flammes, et l’auteur se rend soudainement compte du travail qui l’attend. L’enthousiasme initial s’éteint et lorsque cela arrive, à moins que l’auteur ne s’emballe soudainement, il ou elle échoue à entretenir des conflits ou à amener l’histoire jusqu’à sa conclusion logique. Voilà quelque chose qu’aucun écrivain ne souhaite. Il est difficile d’écrire un milieu qui manque d’inspiration, de direction et d’une raison d’être, et il est encore plus difficile de le lire. Alors comment, nous écrivains, pouvons-nous éviter cela ?

Cela aide de visualiser le livre comme un pont. La rampe d’accès à celui-ci est le début de l’histoire. C’est à ce moment que les personnages principaux ainsi que leurs buts, leurs motivations et leurs conflits sont présentés. Le pont lui-même représente le milieu de l’histoire. Votre travail, en tant qu’auteur, est d’emmener les gens sur le pont et de les y garder jusqu’à la fin de l’histoire — l’extrémité du pont.

Maintenant, visualisez ce pont comme l’une de ces passerelles en corde avec des planches qui surplombent des cours d’eau dans la jungle. Une rivière déchaînée coule en-dessous.

Au milieu du livre, si vous manquez :

  • d’offrir de nouvelles perspectives à vos personnages
  • de faire avancer l’intrigue
  • de mener le lecteur de façon logique d’une planche à une autre

Vous mettez trop de poids sur chaque corde. Qu’arrive-t-il aux cordes surchargées ? Comme pour les personnes débordées, les cordes commencent à craquer et à tomber en miettes.

Vous ne pouvez pas garder tout le monde sur le pont ou les en faire descendre avec succès avec des cordes dans cet état. Le milieu de votre pont fléchit, et vous laissez tomber tout le monde dans la rivière.

Souvent le milieu d’un roman fléchit parce que l’auteur n’a pas créé de conflit suffisamment fort pour nourrir l’histoire.

Souvenez-vous, le conflit est la colonne vertébrale de l’histoire. C’est lui qui pousse les personnages non seulement à agir, mais à agir maintenant.

Le conflit crée de l’urgence, évoque des émotions fortes — et il offre souvent de nouvelles perspectives qui approfondissent le conflit existant ou en engendrent un autre.

Un exemple. Dans True lies, le mari croit que sa femme a une aventure. Elle ne sait pas qu’il est un espion. Il mène donc une double vie. Mais tout ceci n’est pas suffisant pour entretenir un conflit prolongé.

Dans un plan destiné à mettre en évidence l’infidélité de sa femme, assistante juridique, le mari l’entend dire de façon anonyme qu’elle voudrait, juste une fois, prendre un risque, accomplir quelque chose qui sorte de l’ordinaire. Quelque chose qui ne soit pas ennuyeux.

En apprenant que sa femme n’est pas satisfaite de sa vie, le mari entreprend de lui offrir le frisson de l’aventure. Cela renforce le conflit.

Et lorsque les ennemis de l’espion les attaquent tous les deux, ce conflit se déforme et s’approfondit encore. L’aventure devient réelle — et le prix de l’échec s’élève.

Les complications continuent d’affluer. Elles se construisent logiquement et rationnellement en se basant les unes sur les autres. À chaque étape, nous voyons les personnages grandir et changer. Nous voyons moins d’hésitation à agir et plus d’engagement actif puisque leurs motivations continuent de se renforcer. Nous voyons l’intrigue être menée par leurs choix.

En ajoutant de la profondeur et de la dimension à ces conflits, nous menons fermement les personnages sur le pont vers sa sortie. Le milieu ne fléchit pas parce que ses planches sont constamment dispersées par l’agitation : rebondissements, changements chez les personnages, leurs motivations et leur développement.

Souvent lorsque les écrivains sentent que le milieu se termine en queue de poisson, ils suppriment les conflits. En bref, ne faites pas cela. À la place, donnez plus de consistance aux conflits existants en insérant des complications nouvelles, de nouveaux fragments d’informations que les personnages apprennent et qui altèrent leur perspective et leur donnent une nouvelle vision. Des informations qui les forcent à continuer leur voyage sur le pont.

Rendez chaque obstacle auquel les personnages doivent faire face plus difficile à surmonter — un plus grand défi — que le dernier. Rendez les conséquences de chaque obstacle plus difficiles à avaler pour les personnages que celles du défi précédent. Autrement, les défis moins imposants semblent inconséquents par rapport à ce que les personnages ont déjà affronté. Cela diminue la tension.

La tension devrait s’accroître régulièrement du début à la fin du roman.

Si vous avez affaire à un milieu fléchissant, il vous faut aller sur le pont avec vos personnages et vous mêler à eux. Créez des conflits, introduisez des informations nouvelles et irrésistibles qui changent la manière dont les personnages voient leur situation. N’effacez pas les conflits existants, renforcez-les, voire peut-être même ajoutez-en un nouveau.

Pendant une entrevue récente, un animateur de radio m’a dit qu’on lui avait appris en écriture créative à mettre ses personnages dans un arbre et à leur jeter des pierres, et que dans mon livre, je leur avais jeté des rochers. Il y a une raison à cela. Les rochers sont beaucoup plus difficiles à esquiver que les pierres. Vous devez faire avec.

C’est plus délicat à gérer. Cette difficulté produit des défis dans les conflits à la fois internes et externes, qui doivent se réfléchir ou se faire écho, et ceci assure aux auteurs que nos milieux ne fléchiront pas. Nous aurons des conflits suffisamment solides pour supporter la colonne vertébrale de notre roman et pour faire avancer nos personnages sur le pont en toute sécurité.

Dr. Vicki Hinze est une auteur àsuccès et récompensée, qui partage régulièrement ses connaissances lors de conférences nationales pour écrivains, en ligne, ainsi qu’àtravers ses guides sur l’écriture. Son dernier livre non-romanesque est All about writing to sell, dans la collection Livres pour écrivains de Spilled Candy. Cet e-book de 589 pages contient tout ce que vous avez besoin de savoir sur l’art de l’écriture, le monde de la publication et les secrets pour se faire publier. All about writing to sell est disponible sur www.SpilledCandy.com en téléchargement ou sur disque.

Ou bien, vous pouvez aussi visiter le site d’auteur de Vicki sur www.vickihinze.com.

Cet article a d’abord été publié en anglais sur FictionFactor - http://www.fictionfactor.com/.

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